LA CERAMIQUE AUJOURD'HUI Hors-série de la revue Artension

Créateurs de la galerie-librairie terres d'Aligre, Philippe Albizzati et Myriam Bürgi ont été invités par la revue Artension à évoquer ce métier de "passeur" :

"Une galerie est par définition un lieu où les œuvres, les artistes, les visiteurs, du collectionneur au " simple " curieux, sont mis en présence et peuvent se confronter, un espace de liberté d’expression dans lequel les différentes façons d’aborder l’œuvre sont possibles, de l’érudition à l’évocation, du déchiffrement au ressenti.

Comment va-t-on vers l’œuvre, comment l’oeuvre vient-elle à nous ? Tenir une galerie c’est s’enrichir (!), se réjouir et aussi parfois s’attrister de la réception que les visiteurs réservent aux œuvres exposés. Le collectionneur qui situe l’œuvre dans les galaxies de l’art céramique et devant lequel le galeriste débutant a perpétuellement l’impression de passer un examen. Le visiteur qui parle au nom de « ce que ça lui fait » avec le risque de passer à côté de tout ce qui n’est pas « ce que ça lui fait ». L’amateur impatient d’accroître ses connaissances en la matière, l’amateur silencieux qui observe méthodiquement…

Écouter le connaisseur analyser la pièce, la mettre en relation avec d’autres, en explorer toutes les caractéristiques au fur et à mesure de leur découverte, entendre le primo visiteur dire en quoi l’œuvre l’a touché, de quel souvenir elle lui parle, absorber sereinement les exclamations sorties du cœur… Se laisser surprendre par un connaisseur qui soudain met en partage l’émotion ressentie au contact d’une œuvre, par le néophyte qui en quelques visites se découvre capable de relier techniques et rendu d’une pièce, de situer les sources d’inspirations, le style… et d’en tirer une joyeuse satisfaction. Le regard ordinaire d’un récepteur ordinaire est aussi bien accueilli que le regard expert d’un récepteur érudit. Même le silence a sa place, chacun-e est légitime.

La chance de la galerie terres d’Aligre est d’avoir " vitrine sur rue " dans le très vivant quartier d’Aligre. Les passants représentent une grande diversité de publics à laquelle la diversité des expositions permet un jour ou l’autre de franchir le seuil. Il n’est pas rare que lors d’une nouvelle exposition un nouveau visiteur entre en s’accompagnant d’une exclamation devenue légendaire " je passe souvent devant votre vitrine " mais là " il fallait que je rentre ! ". Nous éprouvons toujours à cet instant-là ! un petit pincement de fierté… et une grande curiosité pour ce qui, dans l’exposition, a si vivement fait sens."